Interview - Un focus qui questionne la place des femmes dans la société

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Focus light

Interview de Géraldine Renna, service médiation de L’Ancre

Comment as-tu élaboré le programme de résonances autour du Focus et plus particulièrement en lien avec la thématique « Paroles de Femmes » ?

Au départ, le Focus Me, Myself & I s’est construit autour des spectacles de 3 femmes artistes. Comme ce focus s’inscrivait dans le courant du mois de mars, qui est un mois symbolique puisque le 8 mars c’est la journée de lutte pour les Droits des Femmes, j’ai eu envie d’axer les résonances autour de la prise de parole des femmes. J’ai donc rencontré la Plateforme Femmes de Mars à Charleroi pour mettre en place une collaboration et imaginer ensemble des activités autour de cette thématique. Cette plateforme rassemble les forces vives du terrain carolo (institutions culturelles et associations) et suscite des partenariats pour coconstruire des activités pendant le mois de mars autour de la question de la place des femmes dans la société, des inégalités femmes-hommes et du féminisme en général.

En quoi est-ce important pour L’Ancre de proposer une programmation qui questionne la place des femmes dans la société et d’intégrer l’événement Femmes de Mars?

L’Ancre est un théâtre de création qui, dans sa programmation, met en lumière et soulève des enjeux de société cruciaux. La question de la place des femmes dans la société est non seulement primordiale mais aussi transversale car elle met en évidence un ensemble de questions de société qui touchent les femmes : la précarité, la sexualité, la transmission, l’éducation, les stéréotypes de genre, la charge mentale, la charge domestique… la question des femmes est centrale et vient pointer une multitude d’inégalités entre femmes-hommes, mais aussi des inégalités au sens large dans la société. Il est donc pertinent que le Théâtre de L’Ancre, qui amène sur les plateaux des thématiques de société, intègre Femmes de Mars. L’objectif est bien entendu de contribuer à une société plus inclusive tout en étant cohérent et en questionnent la place des femmes dans le monde du théâtre.

Que visez-vous à travers les activités de ce focus ?

Amener des thématiques de société au théâtre, et en l’occurrence ici la place des femmes dans l’art et la société, vise à ouvrir le dialogue, encourager la rencontre et partager autour de ces enjeux. Nous souhaitons que les citoyen.ne.s se questionnent, se retrouvent pour aborder ces sujets, participent à des ateliers où des paroles vont être libérées, où des tabous vont être levés… Qu’il s’agisse d’ateliers de réflexion ou de créativité, il y a plusieurs portes d’entrée possibles pour susciter le débat et que chacun s’y retrouve en fonction de ses envies et affinités.

Quels sont encore les grands combats à mener en Belgique en ce qui concerne les Droits des Femmes ?

Il faut être sur tous les fronts car nous sommes en période de crise. Or, nous savons que les droits des femmes régressent en période de crise et que rien n’est acquis, les luttes sont perpétuelles. Les combats sont encore nombreux… Qu’il s’agisse des thématiques liées au corps tel que le droit à l’IVG qui est encore très fragile. A tout moment on peut faire marche arrière car l’avortement est partiellement dépénalisé mais n’est pas légalisé. Concernant les droits du corps et à la sexualité, les étiquettes et stéréotypes sont encore très prégnants par rapport à l’apparence et au corps des femmes. Les femmes subissent encore beaucoup d’injonctions sur leur attitude, leur apparence, leur silhouette… il y a une grosse pression qui est ancrée et assimilée depuis que nous sommes toutes petites. C’est pour cela que les enjeux liés à l’éducation et à l’école sont aussi importants … Enfin, il y a également la place des femmes dans l’art et les médias, les familles monoparentales, la précarité, les inégalités salariales, le travail à temps partiel… Les jobs les plus précarisants sont féminins. Par exemple, les jobs féminins liés au « care », au soin, à la relation sont les plus précarisés car les moins rémunérés, alors que sont des jobs essentiels dans notre société.

Quel est le rôle du théâtre et de l’art dans la défense du droit des femmes et vers une plus grande égalité des genres ?

L’art est central car justement il est subversif. On peut tout dire, tout exprimer. Il libère une parole qui n’a peut-être pas sa place dans une société ou dans des lieux tels que l’école ou le travail (ce qui est regrettable) où il y a encore des carcans car ce sont des mini-sociétés. Les espaces culturels et artistiques sont des endroits où il y a une possibilité de repousser les murs, d’être audacieux.euses, d’oser et de s’affirmer. Et l’affirmation de soi, c’est une chose qu’en tant que femme on ne nous apprend pas forcément. En plus des spectacles qui sont de superbes portes d’entrée, le travail de médiation autour des activités permet d’approfondir, de créer des liens de confiance, de se sentir en sécurité pour porter une parole et échanger sans être jugé.e. Cela permet d’être reconnu.e, entendu.e et d’être visible. Et ça, c’est très intéressant car il y a encore beaucoup d’inquiétudes et de détresses qui sont invisibilisées. Le fait de pouvoir mettre cela en lumière dans un théâtre permet d’apporter une visibilisation de situations injustes et parfois méconnues du grand public.

FOCUS ME, MYSELF & I
Du 9 au 31 mars
A L'Ancre et chez nos partenaires
Infos & programme complet du Focus Me, Myself and I